__________________________________INNOVATION on ENGINEERING, MANUFACTURING, FINANCING shaping the AEROSPACE INDUSTRY

16 juillet 2012

Airbus Military A400M : bilan à la veille de sa mise en service opérationnel. Coûts, surcoût et zones d’ombres


Les enseignements du rapport du Sénat sur l’A400M dont nous nous sommes récemment fait l'écho : 

« L’A400M est un avion bien né et ses performances feront de lui un « mètre étalon » dans l’aéronautique militaire. Ses qualités de vol sont confirmées par les résultats de l’ambitieux planning d’essais qu’il a déjà en partie achevé. »

Coûts et surcoût du programme A400M
Le programme d’avion de transport militaire A400M aura couté 20 milliards d’euros. 180 avions pour le moment ont été commandés. Le surcoût du programme s’élève à 6,2Mds€ et à 2,7Mds€ d’aides remboursables.
- EADS prend à sa charge 4,2Mds€.
- Les nations prennent à leur charge 2Mds€ hors taxes (EC janvier 2009) au « prorata du nombre d’avions commandés, hors export, ce qui équivaut à une hausse de 10 % du coût unitaire des avions ». Le prix de chaque A400M a augmenté de 11M€ hors taxes.
- Les nations renoncent aux pénalités dues au titre des retards : 1,2Mds€ 
- Les nations fournissent à Airbus Military un complément de 1,5Mds€ sous la forme d’aides remboursables à l’export : l’Export Levy Facility (équivalent en France de l'article 90).

Marché à l’export
Le chiffre d’un marché potentiel à l’export de 500 avions. Airbus Military se fixe comme objectif la vente de 280 à 300 A400M sur trente ans. Pour la France cela représente une augmentation de 556M€ au titre de l’augmentation des coûts unitaires auxquels il faut rajouter 417M€ dans le cadre de l’Export Levy Facility.



Les erreurs d’Airbus Military
« Airbus Military avait tout d’abord largement sous-estimé les difficultés techniques d’un tel programme et sa capacité à dériver un avion militaire de ses avions civils. Il avait ensuite trop facilement accepté, sans renégociation du calendrier, le fait de développer concomitamment une nouvelle cellule et un nouveau moteur. »




Retour l’expérience, les principes à oublier
« Le principe du juste retour a conduit certains industriels à prendre la responsabilité de parties du marché dont ils ne maîtrisaient pas suffisamment les technologies ou les procédures de certification […] Le principe du juste retour doit être définitivement abandonné et liberté doit être donnée aux industriels contractants de choisir leurs sous-traitants en fonction de leurs compétences et non pas de leur nationalité. »

« Le contrat de type « eyes on, hands off », prévoit, de façon schématique, que les Etats et l’industriel se mettent d’accord sur un prix et une date livraison et prévoient des pénalités financières conséquentes soit en cas de désengagement des Etats, soit en cas de non respect du calendrier de livraison de l’avion […] Le contrat s’est révélé particulièrement inadapté à un programme aussi complexe. Il a empêché un nécessaire dialogue entre les industriels et les Etats et fait prévaloir une approche juridique stérile en lieu et place d’une relation contractuelle mature. »


Zone d’ombre, le maintien en condition opérationnelle (MCO)
Du point de vue du MCO, « les difficultés ne sont pas réglées ». A ce jour, il est prévu de procéder en deux temps :
- signer un premier contrat provisoire de soutien de 18 mois entre l’Etat français et Airbus Military ;
- négocier dans un second temps un contrat plus global, avec les britanniques et peut être les allemands.
« La logique du contrat initial de l’A400M était de mettre face aux Etats un interlocuteur industriel unique, aussi bien pour la fourniture des équipements que pour le soutien de l’avion tout au long de sa durée de vie. »
L’idée initiale d’un contrat global sur les moteurs et la cellule pour la phase de soutien pérenne a été abandonnée.

Bilan de la position française sur le programme A400M 
« La France a été parmi les Etats qui n’ont jamais fait varier la cible du programme, preuve de la justesse de ses choix. Elle a assumé de facto le rôle de nation leader qui aurait dû normalement incomber à l’Allemagne compte tenu de la cible initiale du programme, mais aussi parce qu’elle sera la première à employer cet avion et à donner le ton sur le plan opérationnel et technique. »

Adrien






















Focus sur le contrat de soutien (extraits rapport du Senat Juillet 2012) 

Historique de la négociation sur un contrat global de soutien
« En 2007, sous l’impulsion de la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, les six nations ont cherché à mettre en place un marché de soutien commun suite à une mise en concurrence lancée le plus tôt possible après cinq années de soutien initial confié à Airbus Military sans mise en concurrence. » Premier échec.
« A la suite de cet échec d’une tentative commune, la France a donné la priorité à l’examen d’une coopération avec l’Allemagne car il fallait dans cette hypothèse disposer très rapidement d’un projet d’appel d’offres commun, l’Allemagne souhaitant émettre son appel d’offres pour janvier 2008 afin d’obtenir l’approbation du marché par son Parlement avant la fin de la législature de mi 2009. Malgré une avancée significative des travaux, il est apparu impossible d’aboutir à un appel d’offres commun satisfaisant pour janvier 2008. L’Allemagne a ainsi publié le 21 décembre 2007 un avis d’appel à candidatures pour son seul besoin, ce qui a entraîné l’arrêt des travaux communs. »

« Ce cavalier seul de l’Allemagne est d’autant plus surprenant qu’une coopération entre nos deux pays dans la formation des personnels est en cours de négociation. Un MoU en cours de finalisation prévoit la formation d’une partie des personnels navigants allemands en France, sur la base d’Orléans, pour les vols tactiques (à la fois les vols réels et l’entraînement sur simulateurs) en échange d’une formation au type en Allemagne pour une partie des pilotes français. Quant à la formation de l’ensemble des mécaniciens français elle se fera en Allemagne. »

« Cette absence de coopération dans le domaine du soutien tiendrait au fait que les Allemands seraient réticents au partage des pièces de rechange (spares pooling) alors que les Français y sont très favorables et y voient un axe fort de réduction des coûts. Les responsables allemands, y compris les industriels de MTU rencontrés par vos rapporteurs à Munich, considèrent qu’il est impossible de donner un prix à une pièce usagée et que dans ces conditions ils ne voient pas pourquoi ils devraient récupérer un matériel « usé » par une autre nation qui vole beaucoup plus qu’eux. »